jeudi 19 novembre 2009

Mali: Segou

On avise un taxi clandestin et on négocie le prix pour aller au centre ville. Le palabre commence à 3000. Au fur et à mesure qu'elle s'éternise, d'autres viennent se joindre et donner leurs avis. Au bout d'un moment, un mec en boubou blanc et figure sentencieuse tranche la discussion sur le dernier prix annoncé: 1500. Il a manifestement autorité en la matière car tout le monde se range à son avis.
Dans un nuage de poussière ocre on débaroule à la Mission Catholique de Ségou sise en plein centre ville. Une immense propriété construite en brique et organisée autour de la chapelle avec une capacité d'accueil de 100 personnes. Cette mission de Pères Blancs de la Grande Epoque servait de base arrière aux missionnaires évangélisant les Mendingues et les Dogons. On prend nos quartiers dans une chambre austère mais sympa.
O la douche salvatrice qui nous redonne figure humaine et délasse nos chairs meurtries.
On avise un restaurant qui nous sert une assiette de pommes de terres en ragout et des beignets de bananes plantain, une mousse, un fanta et au lit.
















Au réveil, alors qu'on rejoint l'estaminet pour prendre le dej, un jeune homme nous alpague. Il s'appelle Ousman Felix Diallo, est facilitateur et propose ses services de guide. Pendant le dej, on palabre sur le prix:
Prestation: remonter le fleuve sur 12km et visite d'un village de potiers. Tarif: 50 000, son cousin à la barre.
"bon écoute Ousman, on va la jouer carte sur table, on veut bien de tes services, mais pas à ce prix. Il va falloir être raisonnable; on paiera le prix, mais pas plus ». Ousman est d'accord et déclare la négociation entamée.
Nos atouts: il y a un bureau de Guides Officiels où les tarifs sont affichés. Le voila le prix.
Nos désavantages: on n'a plus assez de thune malienne pour tenir jusqu'à lundi, faut qu'on change fissa des euros avant midi.
1km à pied, une banque, ils font pas le change
500m à pied, une banque, la responsable du change n'est pas venue travailler.
Prochaine banque à 3km. Ousman nous conseille le tuk-tuk importé par les chinois, bien moins cher que le taxi (500 CFA pour 3 km). Arrivés à la banque, fermeture exceptionnelle ce jour. On avise un distributeur de billet: en panne.
Il est midi moins 5, c'est râpé pour le change.
Oh mais attends, dis je à Ousman, tu te dis facilitateur, et bien vas y, trouve un change au noir ou on ne se fait pas escroquer. Ousman se renseigne à droite, à gauche, hèle une charrette à âne, c'est moins cher que le tuk tuk, et on repart vers le graal: le change au black.
Dans une boutique sans âme, derrière une porte en tôle gardée par un mataf, un complet veston assis derrière un bureau nous souhaite la bienvenue et annonce la couleur: j'achète l'euro à 6,4; le taux est raisonnable, on change donc. Pas trop il ne faut pas qu'Ousman nous croit millionnaire, juste assez pour que l'affaire (trouver le change au noir urgemment) soit crédible.
Bien, voila une chose de faite et bien faite grâce à Ousman Felix (Ousman car le père est musulman, Félix car la mère est catholique).



























































En se dirigeant vers le fleuve, on continue la négociation. Ousman est descendu à 40 000.
Sylvie avise le comptoir des guides et consulte les tarifs. C'est 20 000 la pirogue plus 3500 par personne pour le chef du village des potiers qui ensuite le redistribue à la communauté.
On annonce donc a Ousman notre proposition: 26 000 tout compris.
Ousman tire la tronche, c'est pas assez, la famille, tout ça....
Ca fait 2 h qu'on palabre, on arrive au terme. Il faut conclure.
Tenant compte qu'en ces contrées, un guide évite bien des déboires, et que ce matin il s'est bien débrouillé pour le change au noir, on annonce 26 000 plus 5000 pour la journée. Tope la, tout le monde est ok.
Comme il nous reste du temps avant d'embarquer, Ousman nous invite à boire le thé chez lui.
En y allant, contents d'avoir conclu le marché, on échange plus librement.
Ousman désigne Sylvie comme étant sa tata. Elle lui dit être née en Afrique, alors là c'est pas pareil: « tu es plus qu'une tata, tu est de la famille. Désormais tu es Oumou Diallo; Oumou qui désigne la fille ainée, et Diallo comme mon nom ».
Chez lui, toute la famille est attablée autour d'une bassine de riz-sauce. On est conviés à partager le plat familial et mangeons à l'africaine (avec les doigts)
Ensuite, on se retire avec les hommes sous l'arbre à palabre. Et pendant qu'on se partage une pastèque, Ousman prépare le thé. Tout un rituel, qui dure une heure de préparation.
Cuire le thé doucement dans l'eau, vider et transvaser le jus à 5 ou 6 reprises. Faire la même chose avec une autre théière contenant la menthe. Ensuite faire mousser le thé en le vidant/transvasant dans les verres jusqu'à obtention de la mousse. Transvaser dans la menthe, ajouter le sucre, recommencer les transvasements jusqu'à obtenir à nouveau de la mousse, recuire le toutim, vider/transvaser encore et encore. Apres l'obtention d'une mousse de 2 cm d'épais, alors seulement on déguste le breuvage dans l'ordre suivant: les invités (nous), puis sa mère et sa tante, puis ses frères et cousins et enfin lui. Et hop la, c'est reparti pour un 2e thé, puis ce sera un 3e. Ca c'est le thé à l'africaine sous l'arbre des palabres.
Pendant ce rituel, on cause, on débat, on échange. Faut reconnaitre que ça change de chez nous.

Durant tout ce temps, les enfants vont et viennent , fascinés par les photos qu'on fait d'eux, en redemandant jusqu'à plus soif.
























































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