samedi 14 novembre 2009

Mali: Djafarabé - la transhumance

Vendredi, on se prépare à partir: achat des noix de cola qui serviront de cadeaux rituels aux chefs, achat de turbans pour se protéger du soleil et de la poussière, de provisions pour l'expédition et enfin on enfourche les pétrolettes, direction Djafarabe à 120km.
Les premiers 60km se font sur une route en latérite soulevant une poussière rouge qui colle aux vêtements. On roule à tombeau ouvert (50 km/h) en slalomant entre les nids de poules, et ce durant 3 h.
Après la route, on attaque la piste à travers la savane. Le soleil cuit la peau, la poussière blanche nous enveloppe, la piste défoncée nous fait sauter comme des cabris. Il faut tout à la fois éviter les trous et les épineux tranchants comme des rasoirs. Le plus difficile est lorsque la piste se recouvre de sable, que la moto dérape et parfois s'enlise. Il nous faudra 4h à ce régime avant d'atteindre la rive du Niger face à Djafarabe.
On embarque motos, bagages et voyageurs sur une pirogue. Patatras, au moment de monter dans la barcasse, je m'affale comme une grosse tanche dans l'eau boueuse. Une heure plus tard, on accoste à bon port.























Juste le temps de se laver avec un seau d'eau, faire la petite lessive rituelle, avaler un repas réparateur, boire le thé rituel et au lit. La pièce servant de chambre à coucher relève plus d'une bergerie que d'autre chose. Le confort est plus que sommaire, il ne faut pas être impressionné par les araignes, cafards et autres margouillats (gros lézards) habitués des lieux. On pose le bardas, installons les moustiquaires, faisons fi des habitants locaux et nous endormons, Amadou et Boukari couchés en sentinelles devant la porte, à la belle étoile. Beau cliché colonialiste s'il en est !
Samedi matin, réveil a 7h30 afin d'être sur les berges au plus tôt afin de ne rien rater de la Grande Traverse.




























Lorsqu'on arrive, la foule est massée sur la rive autour de danseuses se trémoussant au rythme de la flute et des tambours. Jeunes filles en blanc, soigneusement tressées et portant leurs plus beaux bijoux, enchaînent les danses durant 2 heures. Puis ce sont les femmes qui effectuent d'autres danses traditionnelles. Pendant ce temps, les troupeaux se massent sur la rive opposée. Arrivée des officiels: ministre, préfet, député, maire, chef de village, chef de traverse, suivis de toute une tripotée de gens à l'allure importante. Après les salutations à la foule en liesse ce beau monde s'assoit à l'ombre d'une tente et s'apprête à présider la Traverse.







































































































































Les familles Peul embarquent pour rejoindre la rive de destination, prêts à accueillir les bergers et les troupeaux lorsqu’ils auront effectué la Grande Traverse.
Au signe de départ, le premier troupeau se lance dans le fleuve. Les bêtes sont guidées par leurs vachers à grands coups de gourdin, et nagent, portées par le courant. Hommes et bêtes franchissent les 300m du fleuve. Arrivées sur la berge, les animaux épuisés ont grand peine à s'extraire de la boue. La foule enthousiaste commente le savoir-faire des vachers qui ont pu mener sans encombre toutes leurs bêtes à bon port.












Les troupeaux se succèdent, les bêtes par milliers franchissent le fleuve, s'extraient ruisselantes de l'eau et vont se reposer de leurs efforts dans la savane. Chaque famille propriétaire regroupe ses vaches dans un concert de meuglements, de cris et de galops. 

































Les vachers retrouvent leurs familles après 6 mois de séparation; toute cette affaire est rondement menée sans trop de dommages puisqu'il n'y aura que 3 ou 4 vaches noyées sur les milliers qui ont traversé. Celles ci seront aussitôt dépecées dans l'eau par les villageois qui s'approprieront les morceaux avant que le prochain troupeau n'accoste.
Cette grande traversée annuelle est impressionnante. Parfois plusieurs centaines de bêtes arrivent ensemble, et la, ça piétine, ça bouscule, ça meugle, les vachers invectivent, frappent, tirent, poussent et dégagent rapidement avant que n'arrive le prochain convoi.






Il en est ainsi toute la journée dans un tumulte soigneusement contrôlé. Des soldats tiennent la foule à distance, mais ils sont régulièrement débordés. Le tout  se déroule dans une ambiance colorée, criante, avec en fond sonore la flute et les djembés. Nous déambulons au milieu de ce tumulte, les enfants se précipitent vers nous en criant "toubabou photo, toubabou photo". Ils s'agglutinent, se poussent, se chamaillent, et la photo faite c'est un concert de cris de joie en se voyant sur l'écran. Nous regrettons que les bergers Peuls soient plus réticents à poser pour l'objectif, mais nous arrivons par quelques prises dérobées à constituer un bel album souvenir.




1 commentaire:

Unknown a dit…

ce fut chouette de lire vos pérégrination en terre malienne, c'est encore plus sympa avec les photos.
Merci bien pour ce voyage par procuration.