lundi 9 novembre 2009

Mali: Pays Dogon (Ende-Dourou)

Dogons - Ende
On poursuit la route jusqu'à Ende Toro formé de 2 villages juxtaposés. A flanc de falaise, les mêmes anciennes demeures mais avec des peintures rupestres refaites tous les 60 ans (c'est la durée de la Marche les ayant amenés ici il y a des lustres). Sculptures, décorations en terre, peintures, tout reflète la cosmogonie Dogon.

Dans l'après midi on flâne dans la fabrique d'indigo, ce qui fait qu'on arrive à la nuit au campement de Yabatabou.





















Dogons - Yabatalou
Gabriel ayant fait croire à Sylvie qu'il restait 3km à faire, celle-ci serre les dents et fulmine en marchant au pas de course. Lorsqu'elle découvre la taquinerie, elle promet solennellement à Gabriel, hilare, qu'elle saura lui rendre la pareille.
Dans le pays Dogon, les salutations durent une éternité: on salue, s'enquiert de la santé, si le sommeil a été bon, si la famille va bien, si la récolte a été bonne... En journée, ordinairement on croise bien 10 personnes amenant à autant de fois le rituel des salutations.

Ou ça frise la folie furieuse, c'est au réveil et au coucher: tu enchaîne 20 salutations successives ! Voila ce que ça donne (orthographe non garantie):
agano               bonjour
ouseom           comment ça va
i seo                je vais bien
ou ma sa         comment va la famille
seo                  ça va bien
gue seo           comment va la santé
seo
et etc. etc.
On conclue par
po ou cuna      au revoir
et enfin
amase medagama     bonne journée

dans le "etc etc" on va avoir, selon les cas, les frères, le père, l'ami, le voisin, la grand mère... en tout cas il y a au minimum 8 à 10 requêtes chaque fois !
La nourriture, que ce soit en famille à Djenné, ou ici au campement, est très copieuse et très bonne bien qu'invariable (riz, mil, couscous et spaghettis avec agneau ou poulet) mais le meilleurs ce sont les mangues dont nous nous délectons à nous en faire péter la sous-ventrière. Et pour ce soir c'est toujours dodo à la belle étoile, mais sans aucun autre touriste. Calme et volupté sous la voûte étoilée.

Programme de la journée: escalader les 300m de la falaise pour atteindre le plateau. On passe à travers une faille naturelle, parmi des éboulis aménagés en pseudo escaliers. Parfois une échelle (si on peut appelé ainsi un tronc entaillé) permet de franchir l'abîme. Sur le plateau, vue vertigineuse sur la plaine s'étendant à perte de vue. 

Dogons - Indelou
A midi on arrive à Indeli: village de plateau en pierres sèches où nous nous restaurons de patates douces agrémentées d'une sauce pimentée, de légumes et de bouts de viande. Rab de mangues au dessert, et sieste pendant les heures chaudes (13h-16h).
Avant de repartir, nous visitons le village. Dans une maison, une vieille bronchitique confectionne la bière de mil dans une pièce surchauffée et enfumée. L'air acre envahit les poumons et pique les yeux. Plus loin, le Maître du Feu (le forgeron) s'affaire à terminer quelques couteaux pour le sacrifice du mouton qui aura lieu demain. Outils désuets, soufflets de forge en peaux tendues sur un appareillage en terre cuite. Le forgeron, bien que de caste inférieure, jouit ici d'un grand prestige.
On enchaîne avec la demeure du guérisseur, Maître des Plantes et des Sortilèges, confectionneur de puissants gris-gris.
Nous terminons en saluant le futur Hogon, vieillard noueux qui, dans quelques mois, assumera sa charge dans la réclusion totale. Il a été élu à la mort du précédent titulaire il y a presque 3 ans. Ce n'est qu'à l'issue de ce délai que les funérailles auront lieu et qu'il pourra investir pleinement ses responsabilités.













































































































Dogons - Begnematou
Nous reprenons le chemin, et on découvre Begnematou: au pied du village une source jaillit de la roche, ô surprise elle est aux environs de 24°. Cette chaleur étant due aux 20m de rochers sous lesquels l'eau coule et puise la chaleur emmagasinée.
Peu importe, on bondit dans l'eau jaillissante, nus comme au premier jour et heureux de l'aubaine.
Coucher en terrasse, comme d'hab; sauf que sur le plateau le vent souffle sans discontinuer. Si la journée il est bienvenu pour atténuer la chaleur étouffante, la nuit c'est carrément frisquet. Au matin, on visite Bégnematou. Le village se partage en 3 quartiers: musulmans, chrétiens, animistes. Sur la place du village, un arbre curieux se dresse: l'arbre à nokia. Ses fruits invisibles le jour poussent spontanément la nuit venue. Dogons et guides se pressent pour le cueillir lorsqu'il émet un bruit très caractéristique, en général une mélodie stridente accompagnée d'un rai de lumière. Le fruit cueilli n'est pas mangé. On le pose entre la bouche et l'oreille, on lui murmure une incantation qui serra entendu par un autre fruit identique dans le village voisin. C'est grâce aux fruits de cet arbre que les Dogons communiquent avec les membres de la famille partis à Bamako, Djenné ou Tombouctou. C'est dire que cet arbre est précieux.




Nous continuons notre promenade dans le village. A l'écart est le cimetière: excavation murée avec calebasses à l'entrée ayant servi pour la toilette mortuaire. Après la cérémonie, la calebasse est abandonnée sur place.
Dans le village on visite la maison du chasseur. Le Nemrod traque le singe et le chat sauvage sans dédaigner lézards et oiseaux. Ses pétoires à silex sont chargées d'une poudre obtenue par calcination d'une plante puis mélangée à de la potasse se formant naturellement sur la falaise par les eaux d'infiltration.
On se hâte de partir car 3 heures de marche nous attendent ce matin avant la halte de midi à Dourou. 

















On chemine sur la rocaille du plateau, rencontrant parfois des trous d'eau, ornés de nénuphars, autour desquels la végétation est luxuriante: baobabs, palmiers, manguiers, goyaviers, dates sauvages (très amères), raisin sauvage (rien à voir avec nos vignes, c’est un arbre gros comme un cerisier), tamarin (pour les ventres secs), cactus et épineux.
La terre arable est cultivée d'oignons, épices, aubergines, patates douces, mil, poivrons, tomates, sorgho, tabac, le tout dans des parcelles limités par des pierres empêchant l'érosion car en hiver l'eau coule en flots furieux des semaines d'affilée.
Dans les environs de ces petits plans d'eau naturels, les Dogons creusent des trous profonds pour y puiser l'eau afin d'arroser les jardinages. Tout le plateau apparemment désertique est constellé de ces petites sources et permet ainsi la culture.

Le repas épicé d'hier midi a eu des effets inattendus. Je pisse rouge hibiscus tous les 1/4 d'heure l'équivalent d'un verre à liqueur avec la sensation d'évacuer des épines. D'après Gabriel cela arrive fréquemment avec ces piments, il suffit de boire beaucoup pour que cela disparaisse. Merci du conseil, en attendant je vais prendre en plus des anti-inflammatoires.
Aujourd'hui, c'est la fête de Tabaski. On dépèce les moutons pour le repas du soir et les enfants arborent leurs plus beaux habits. On termine la marche sur le plateau par la redescente dans la plaine, toujours à l'aide d'une faille. On y croise un troupeau de matuvu dont les guides sont à la peine. 









































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